Il faut que je vous raconte cette journee.
Un copain, Merveille, m'apprend le Lingala. Il est venu ce matin a la maison pour me donner une heure de cours. Ensuite, nous avons discute sur la construction d'un biodigesteur. Construire un biodigesteur est un petit morceau de mes projets. En gros, j'aurais besoin de pouvoir en installer dans une ferme afin d'avoir du gaz de menage a disposition. Mais comme il y a beaucoup de petits elevages de porcs ici a Mont Ngafula et que les gens depensent souvent 18$ par mois en charbon de bois, j'ai pense qu'il pouvait y avoir une clientele pour une entreprise qui installerait des biodigesteurs bon marche. D'apres mes premieres estimations, a raison de 18$ par mois, en un an, l'entier du materiel du biodigesteur est rembourse. Bref, on a parle de ca parce que je n'ai absolument pas le temps de gerer une telle entreprise et qu'il etudie la gestion d'entreprise. Et ce matin, on a fait la liste du materiel qu'il nous fallait pour pouvoir estimer le prix de revient.
Donc nous sommes partis en ville avec ma voiture. Il y a naturellement eu des courses supplementaires a faire. Mais c'est habituel ici. Il faut compter avec ca. Le premier evenement marquant a ete un attentat suicide de mangue. Une mangue a saute du haut de sa branche pour venir casser mon pare-brise. Elle est arrivee tellement fort que j'ai cru qu'on l'avait lancee. Mais bon... ce n'est pas trop grave: il y a juste un bel impact. Bien sur, il y a aussi eu les embouteillages et le respect tres approximatif du code de la route qui vous force a vous imposer. Depasser des taxi-bus arretes sur la chaussee. Laisser passer un vehicule mal place qui bloque une voie depuis cinq minutes. Zigzaguer entre les pietons (mais comme on ne roule pas vite et qu'ils regardent bien, ca ne pose pas trop de probleme). Eviter les nids de poule. Et bien sur: trouver son chemin. Heureusement que Merveille me guidait.
Nous sommes arrives au grand marche (a Zando, pour les connaisseurs et les curieux). Et nous avons commence a chercher. C'est dur de trouver un film tubulaire en polyethylene, a Kinshasa. Quant aux tuyaux en ceramique, on nous a meme affirme que ca n'existait pas. Les tuyaux sont en PVC ici. Ou eventuellement en metal. Bon, comme on avait aussi besoin de tuyaux en PVC, on a pu trouver une bonne partie facilement a un prix raisonnable. Le rechaud a gaz est neanmoins peu courant et assez cher ici. Les Congolais ayant l'habitude d'importer beaucoup de choses d'Europe et, les frais de douane etant exorbitants, le prix de beaucoup de choses est demesure compare aux salaires. Comme il avait plu, c'etait boueux. Plotch plotch. Mais on apprend vite a mettre les pieds au bon endroit. Et on recoit tres facilement de l'aide pour aller trouver ce que l'on cherche. Parfois par des incompetents qui pensent serieusement qu'on peut trouver un rechaud a gaz dans un magasin d'electronique. On a reussi a avoir une partie des informations que l'on cherchait.
Au retour, je suivais machinalement une file de voiture qui allait dans la direction ou je voulais me rendre. Soudain, des policiers me font des grands signes. Il faut que je m'arrete. J'apprends que la file de voiture que je suivais roulait a contresens dans un giratoire et que je suis l'heureux gagnant du tirage au sort d'une contravention. Tout ceci se passant evidemment en plein milieu de la chaussee. Donc embouteillage cree par des policiers esperant ranconner une proie facile. J'ai du gueuler et commencer a rouler avec des policiers accroches a ma voiture pour pouvoir me parquer en dehors de la circulation. Un conseil: si vous etes dans une telle situation: ne vous arretez pas. Forcez le passage et insultez les policiers. La plupart du temps, vous connaissez mieux le code de la route qu'eux. En plus ca defoule. Si vous etes arrete, restez en plein trafic et creez un embouteillage: les policiers finiront par vous lacher en voyant que vous n'etes pas pret a laisser passer les autres automobilistes. Mais il faut compter 15 a 30 minutes d'immobilite. Bon. Je me suis gare. Ils ne voulaient pas entendre l'argument de la file de voiture que je suivais et qui avait continue apres que je sois parti. En gros, ils n'ecoutaient rien. Ils m'ont demande la carte du vehicule et le permis de conduire. Ayez une copie, parce qu'ils peuvent les garder. Personellement, j'ai utilise la methode "je ne bouge pas tant qu'on ne me les a pas rendus". Et je n'ai pas donne la clef du vehicule. Ils m'ont fait alle au poste pour voir le chef. Long debat. Il a fallu donner toutes les informations sur le vehicule et sur moi. Assurance? Il n'y en avait pas. J'ai dit Generalli, en Suisse. Ca a impressionne. Proprietaire du vehicule? Il est encore au nom de l'ancien proprietaire. J'ai dit que c'etait la personne sur la carte et que c'etait une amie. Pour le reste, j'ai joue le role que je joue le mieux: l'integrite absolue. J'ai reconnu mon erreur mais j'ai emmerde sur chaque detail pas clair. Par exemple, l'amende pour un contresens est 20 a 40$, mais sans preciser comment apprecier l'infraction. J'ai reussi a avoir 20$, mais pas en argumentant: en restant inflexible. Je me dis que c'est un moindre mal et que c'est une contribution a la RDC. Mais je n'avais pas la monnaie. Il me propose de me rendre en francs congolais. Je demande le taux et il me donne un taux defavorable. Je refuse et je pars changer mon argent. Au retour, je lui dis que j'ai l'argent, que je veux payer, mais que je veux une quittance (surtout pour lui eviter de mettre l'argent dans sa poche). Il me dit que ce n'est pas possible et qu'il faut revenir demain. Je refuse: pourquoi je devrais payer l'essence juste parce qu'il ne veut pas me donner de quittance. Il me dit que la personne qui fait ca est absente et qu'il ne peut rien faire, meme pas ecrire un papier reconnaissant que j'ai paye mon amende. Et je pique la mouche. Je savais que connaitre le vice-premier ministre est un moyen facile de faire sauter une amende, mais comme c'est un homme qui lutte contre la corruption, je ne voulais pas l'utiliser pour ca. Par contre, pour empecher un policier de mettre le prix de l'amende dans sa poche, je n'ai pas hesite. Et il a fallu commencer a telephoner pour que la situation se debloque. Le superieur est venu. Merveille a mis la touche finale en expliquant au policier ce qu'il risquait et le chef m'a dit de partir sans rien payer. Je n'en revenais pas.
Et sur le retour, il faisait nuit. Il avait plu, donc c'etait boueux par endroits. On s'est perdu plusieurs fois. Il y avait des embouteillages. Mais on a fini par arriver. Malgre le peu de choses utiles accomplies dans cette journee, j'ai eu le sentiment de journee bien remplie.
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